L’intelligence artificielle dans l’éducation : Enjeux, défis pour l'enseignement et l'apprentissage
L’intelligence artificielle a envahi notre quotidien et il est impossible d’ignorer sa place dans tous les secteurs de la société. Elle est en émergence dans le domaine de l’éducation avec l’arrivée d’applications et de dispositifs à destination tant des apprenants que des enseignants. L’objectif est d’améliorer la qualité, l’efficacité et l’équité de l’éducation ! Les enjeux sont de taille et un dossier spécial lui est consacré sur notre blog. Trois articles sont d’ores et déjà programmés.
Introduction du dossier de l'IA dans l'éducation : Quels enjeux pour enseigner et apprendre avec l'IA ?
Après avoir donné une définition de l'IA, nous nous proposons d'analyser sa place dans l'apprentissage des élèves et les retombées sur l'enseignement. L'enseignant voit-il sa place et son rôle modifiés ? Notre focus portera sur des exemples choisis dans divers domaines qui mettront en avant la personnalisation des parcours avec l'IA en créant de la valeur pour les élèves et les enseignants.
L'IA dans l'éducation comme sujet d'enseignement
Dans cet article, nous posons notre focus sur l'IA comme sujet d'enseignement. À l'heure de la société de la connaissance, il est important que chaque citoyen ne soit pas un simple consommateur de technologie. Nous avons des défis à relever autour des sciences du numérique qui doivent avoir la même place que les sciences de la vie et de la Terre dans la formation d'un individu dans les programmes scolaires. L'intelligence artificielle est particulièrement concernée. Les élèves, au quotidien se retrouvent en face de l'IA comme par exemple à travers « Alexa » qui annonce la météo du jour. Les enjeux sont de taille. Comment dépasser les représentations initiales des élèves qui peuvent penser que ces petites machines fonctionnent comme par magie. Il est crucial que les élèves puissent comprendre comment ces voix peuvent nous informer du temps. L'école a un grand rôle à jouer.
Comme pour l’enseignement et l’apprentissage de la programmation qui a connu un essor exceptionnel au cours des dernières années, l’idée n’est pas de faire des jeunes formés à l’école des ingénieurs informatiques. Il s’agit plutôt de les préparer pleinement au monde de demain et de comprendre ce qu'est l'IA en se posant ces questions cruciales.
- Quelle place pour l'IA dans les contenus disciplinaires ?
- Que devrait savoir chaque élève sur l’IA tout au long de la scolarité et avec quels projets ?
L'IA dans les systèmes éducatifs - Politiques éducatives
L’objectif du projet IA pour l'éducation est de contribuer à faire en sorte que les principaux acteurs des systèmes éducatifs nationaux soient prêts et aptes à exploiter le potentiel de l’IA. Ceci afin de garantir une éducation inclusive, équitable, de qualité et des opportunités d’éducation tout au long de la vie pour tous. Des standards pour l 'IA et l'éducation ne sont-ils pas nécessaires pour relever tous les défis éthiques, techniques et pédagogiques ? Quel est l'état d'avancement au niveau international permettant d'exploiter l'IA et élaborer des politiques éducatives sur l'IA ?
Comment définir l'IA ?
Pour le citoyen « lambda », l’intelligence artificielle soulève la question de sa définition.
Définition de Boris Barraud
Selon Boris Barraud, parler d’ « intelligence artificielle » est un abus de langage. « Intelligence artificielle » vient de l’anglais « artificial intelligence ». Cette expression désigne dans la langue de Shakespeare la simple gestion de données, le traitement de l’information, et non l’intelligence artificielle telle qu’on la comprend en français qui se traduirait plutôt par « artificial cleverness ». En effet, cette dernière désigne le sens commun, l’empathie, l’arbitraire éclairé, la faculté de comprendre sa propre intelligence et d’en avoir conscience. En somme, il n’est pas déceptif, en anglais, d’évoquer une « artificial intelligence » afin de désigner ces nouvelles technologies. Mais il est maladroit, en français, de parler d’ « intelligence artificielle ».
Définition de John McCarthy
Selon le père de l’intelligence artificielle, John McCarthy, l’IA signifie “la science et l’ingénierie de la fabrication de machines intelligentes, en particulier des programmes informatiques intelligents”. Cependant la définition précise et la signification du mot intelligence, et encore plus de l’intelligence artificielle, fait l’objet de beaucoup de discussions et cause beaucoup de confusion. Comme nous l’indique le conseil de l’Europe, le terme d’« intelligence artificielle »(IA) est entré dans le langage commun. Et son utilisation devenue banale dans les médias, il n’en existe pas réellement de définition partagée.
Définition du Conseil de l’Europe
Pour le Conseil de l’Europe, au sens large, le terme désigne indistinctement des systèmes qui sont du domaine de la pure science-fiction (les IA dites « fortes », dotées d’une forme conscience d’elles-mêmes). Et des systèmes déjà opérationnels en capacité d’exécuter des tâches très complexes (reconnaissance de visage ou de voix, conduite de véhicule ces systèmes sont qualifiés d’IA « faibles » ou « modérées »). Les spécialistes préfèrent en général employer le nom exact des technologies concrètement en œuvre, elles relèvent aujourd’hui essentiellement de l’apprentissage automatique ou du machine learning.
Définition de l’Inria
Dans le livre blanc, “Éducation et Numérique : enjeux et défis” (Giraudon et al. 2020, p.32), de l’Inria, l’intelligence artificielle y est définie comme “l’automatisation des processus et comportements que nous, humains, percevons comme intelligents”.
Définition de Legifrance
Enfin, sur Legifrance (2018), l’IA est définie comme le « champ interdisciplinaire théorique et pratique qui a pour objet la compréhension de mécanismes de la cognition et de la réflexion. Et leur imitation par un dispositif matériel et logiciel, à des fins d’assistance ou de substitution à des activités humaines ».
L'IA pour l'éducation : Quels enjeux pour apprendre et enseigner ?
Dans son rapport, le CNESCO a montré toutes les potentialités du numérique dans le domaine de l’éducation pour lesquelles l’enseignant joue un rôle majeur :
« le numérique constitue un ensemble d’outils, pas une solution. Un outil numérique reste un outil, pouvant offrir une solution parmi d’autres ressources à un objectif d’enseignement/apprentissage. Or Il ne constitue pas en lui-même une solution. En effet, ce sont toujours les enseignants qui construisent un cours, pour des élèves donnés, dans une temporalité donnée et avec des ajustements permanents à effectuer. Alors, si les outils numériques peuvent constituer des appuis efficaces pour l’apprentissage (en termes de diagnostic, d’entraînement, de feedback, etc...), ils ne peuvent le provoquer seuls. Comme l’a par exemple montré l’enseignement à distance pendant la période de confinement récente ».
CNESCO
L’IA permet aux machines d’interagir naturellement avec les élèves, les données et les environnements. Elle crée des interactions plus intuitives et étend ce que les humains ou les machines peuvent faire par eux-mêmes. Mais elle peut aussi comprendre les contextes, reconnaître les émotions, les visages, les sons et l’écriture manuscrite. Enfin, elle peut analyser de grandes quantités de données collectées auprès de chaque élève, d’autres élèves de la classe et de l’enseignant pour recommander, traduire et modifier le contenu tout en s’améliorant continuellement pour générer de meilleurs résultats à long terme.
Des applications qui apprennent aux enfants à lire, à un enseignant virtuel qui enseigne via le tableau intelligent, les possibilités de l’intelligence artificielle (IA), dans l’éducation semblent infinies comme le témoigne le schéma de synthèse du rapport de l’UNESCO.
Éducation : Apprendre avec l'IA
Les apports de la reconnaissance vocale
Grâce à la sophistication croissante des techniques d’IA telles que le traitement du langage naturel, la reconnaissance vocale et l’apprentissage automatique, l’enseignement peut être transformé dans le domaine des langues vivantes. Les élèves peuvent s’entraîner avec un feed-back immédiat de la machine IA.
Par exemple, SoapBox transforme les expériences de jeu et d’apprentissage pour les enfants du monde entier grâce à la technologie vocale. Ils peuvent d’exercer et se corriger individuellement grâce au feed-back immédiat.
Young kids around the world are learning English using our voice tech.
— SoapBox Labs (@soapboxlabs) August 13, 2020
Here's 5 year old Aku. He makes it look sooo easy 😊#edtech #ELL #ESL #voicefirst #remotelearning pic.twitter.com/cZhCDxi83d
Les outils d’alphabétisation et de langage à commande vocale permettent aux enseignants d’évaluer les élèves plus régulièrement et de déterminer rapidement où un enfant peut avoir des difficultés ou avoir besoin de plus de soutien, d’intervention ou de dépistage. La linguiste Agape Deng nous le montre avec des démonstrations du moteur vocal SoapBox qui renvoie un retour immédiat sur la prononciation des mots, des expressions et des phrases, jusqu’au niveau du phonème.
Cas d’usage en vidéo : SoapBox
Par ailleurs, l’équipe Multispeech du laboratoire Loria de Nancy mène des travaux de recherche sur la reconnaissance automatique de la parole et la synthèse audiovisuelle (l’animation de têtes parlantes). Elle utilise des techniques de l’intelligence artificielle, en particulier celles du deep-learning. La reconnaissance automatique de la parole des non-natifs est un problème de recherche d’actualité. En effet, l’animation d’une tête parlante à partir du texte permet d’illustrer la parole d’une langue donnée. Dans le contexte de l’apprentissage des langues, la tête parlante permet à l’apprenant de visualiser la prononciation de sons. Et la reconnaissance de la parole vise à donner un retour à l’apprenant sur sa prononciation.
les apports de l’adaptative learning : la personnalisation des parcours
Chaque élève est différent avec un rythme d’apprentissage qui lui est propre. Or, prendre en compte la diversité des élèves, adapter son enseignement et son action éducative à la diversité des élèves sont des compétences attendues des enseignants. Ces dernières ne sont pas toujours faciles à mettre en œuvre dans le contexte de l’hétérogénéité des classes. L’enseignant, dans le cadre des programmes scolaires standardisés est chargé d’accompagner, et de répondre aux besoins individuels des élèves. Mais avec l’IA, la personnalisation des parcours peut être facilitée avec l’ « adaptative learning » qui permet aux élèves d’accomplir les tâches à leur propre rythme.
Qu’est-ce que l’adaptive learning ?
Le dernier rapport de l’OCDE de 2021 lui consacre un chapitre spécial et nous en donne une définition. « L’adaptative learning » est l’une des nouvelles disciplines jeunes de la science des données. Elle étudie comment utiliser des approches d’exploration de données, d’apprentissage automatique, de traitement du langage naturel, de visualisation et d’interaction homme-machine, entre autres. Et elle a pour but de fournir aux éducateurs et aux apprenants des informations susceptibles d’améliorer les processus d’apprentissage et les pratiques d’enseignement ». En outre, la finalité est d’adapter les décisions pédagogiques aux compétences et besoins particuliers de chaque apprenant. Pour ce faire, l’enseignement prend en considération le profil de l’apprenant (ses connaissances, ses préférences, ses aptitudes, ses objectifs…) dans la construction d’un parcours pédagogique unique. De surcroit, ceci apporte une grande aide dans le suivi des élèves.
Enfin, le rapport sur l’IA de Deloitte nous décrit le principe prenant en compte le modèle d’apprentissage des élèves, le modèle d’enseignement, les évaluations en regard des compétences du curriculum, des contenus avec des objets d’apprentissage.
Source : Rapport Deloitte page 14
Le développement de solutions d’IA adaptative learning en éducation
Pour le développement de solutions d’IA adaptative learning en éducation, il est à la fois nécessaire d’avoir des données de qualité et des algorithmes permettant leur traitement.
D’une part, les données éducatives produites et accessibles sont un enjeu de premier plan. La qualité de ces données est liée à la fois à la pertinence en lien avec le domaine disciplinaire, le curriculum, et la tâche d’apprentissage abordée, au modèle de l’apprenant et au modèle pédagogique.
D’autre part, des tableaux de bord générés par les applications de l’IA permettent de synthétiser énormément de données et préconiser des marches à suivre aux professeurs. Avec les données récoltées sur les résultats des élèves, l’IA va permettre de mieux personnaliser l’enseignement en aidant les élèves à améliorer leur apprentissage et en apportant une assistance aux enseignants.
L’adaptative learning alimentée par l’IA pourrait être comparée à des compagnons d’apprentissage capables d’accompagner et de soutenir les apprenants individuels tout au long du curriculum avec de nouvelles formes d’évaluation qui mesurent l’apprentissage pendant qu’il a lieu, façonnant l’expérience d’apprentissage en temps réel.
Source : Rapport Deloitte page 16
A travers les traces de l’apprenant (résultats à des questionnaires, interaction avec le logiciel…) et son comportement, le système va modifier son fonctionnement pour essayer de s’adapter à la personne.
Les exemples de l'adaptive learning pour l'éducation
Partenariat d’innovation et intelligence artificielle (P2IA)
L’un des défis auquel fait face notre système d’éducation aujourd’hui est de voir comment tirer parti des nouvelles possibilités qu’offre l’IA en éducation. Pour ce faire, un partenariat d’innovation et intelligence artificielle (P2IA) avec le ministère de l’Éducation nationale s’est mis en place afin pouvoir développer des solutions d’assistance et de recommandations s’appuyant sur des techniques d’intelligence artificielle à destination des enseignants de l’école primaire du cycle 2 afin de mieux accompagner leurs élèves dans leurs apprentissages du français et des mathématiques.
Des outils avec l’IA pour la construction de solutions au service des apprentissages fondamentaux en français et mathématiques au cycle 2 (CP, CE1 et CE2) sont proposés par diverses sociétés. Par exemple, Lalilo est une application Web qui permet aux 7000 enseignants et 40.000 élèves inscrits de personnaliser leur apprentissage de la lecture. Cet assistant pédagogique s’adapte au rythme de l’enfant, grâce à l’apprentissage adaptatif (« adaptative learning »).
EvidenceB développe des parcours d’activités
Créée en 2017, EvidenceB développe des parcours d’activités (logiciels et contenus) pour débloquer l’apprentissage des savoirs fondamentaux chez les élèves, de la maternelle au lycée. Destinés à être utilisés par les enseignants auprès de leurs élèves, ces modules d’apprentissage adaptatifs sont élaborés avec des enseignants-auteurs à partir des résultats de recherche en sciences cognitives et renforcés par un moteur d’intelligence artificielle. Lancé en novembre 2020 au sein de plus de 180 classes de CP, CE1, et CE2 de 13 académies françaises, Adaptiv’Math est la première solution de l’IA au service de l’éducation conçue par EvidenceB, la startup spécialisée en enseignement personnalisé avec Intelligence Artificielle qui s’adapte aux difficultés de chaque élève.
Le projet METAL
Le projet METAL du laboratoire Loria de Nancy vise l’amélioration de la qualité et de l’efficacité de l’apprentissage, en particulier pour la maîtrise des langues à l’écrit comme à l’oral. Le dispositif permet la personnalisation des apprentissages pour les élèves et leur suivi individualisé par les enseignants, reposant sur l’exploration des traces digitales laissées par les apprenants lors de leurs interactions avec l’environnement et les outils d’apprentissage.
L’Intelligence Artificielle dans les écoles chinoises
Le but pour le ministère est d’assurer une infrastructure augmentée et améliorée pour l’éducation de l’IA. La Chine qui dispose d’une certaine avance en matière de développement technologique teste l’intégration de l’IA à l’éducation, afin d’atteindre « l’éducation intelligente » comme le rapporte le rapport du MIT. (MIT Technology Review).
Avec l’aide de la société Squirrel AI, la Chine fournit des tutorats personnalisés aux élèves et propose des cours personnalisés. Elle le fait « en masse » dans les disciplines en essayant de « standardiser les connaissances » tout au long du curriculum. Pour ce faire, chaque cours est préparé par une équipe d’ingénieurs et de professeurs qui cherchent à découper la discipline en un nombre infini d’éléments conceptuels ou de notions. Ces derniers sont ensuite soutenus par des vidéos, des exercices, des mises en activités interactives à plusieurs niveaux.
Comme indiqué par le MIT, pour commencer son module d’apprentissage, dans un premier temps, l’élève passe un test de diagnostic qui permet de déterminer lles notions qu’il a acquises ou non. En 2017, une étude de l’entreprise Squirel IA a montré que « le système était en moyenne meilleur pour améliorer les résultats aux tests de mathématiques que les enseignants expérimentés qui enseignent à une douzaine de jeunes dans une classe traditionnelle. » L’ambition de Derek Li, fondateur de Squirrel AI va au-delà du tutorat personnalisé. Il souhaite intégrer sa technologie dans les salles de classe afin de faire de Squirrel AI « la principale méthode d’enseignement ». La possibilité de mesurer les traces d’apprentissage fournit aussi des sources de mesures pour mieux comprendre sur le long terme les apprentissages humains, grâce à l’utilisation d’un logiciel, ou par des capteurs.
Pour en savoir plus sur le dispositif IA chinois Squirel-AI
- Présentation de l’IA en Chine Squirel Edu :
- Entretien avec le concepteur Squirel Edu de Chine Derek Haoyang Li, Founder :
- Joleen Liang, partenaire et vice-présidente principale de Squirrel AI Learning by Yixue Group, explique comment fonctionne la plate-forme IA, son contenu, les objectifs du programme, sa base d’étudiants et ses perspectives pour l’industrie :
Enseigner avec l'IA : Quels rôles et quelle place pour les enseignants de l'éducation ?
Les enseignants n’ont pas toujours conscience que la structure de leurs cours laisse parfois les élèves dans une situation de confusion et d’incompréhension. Notamment pour ceux qui sont en difficultés. De plus, les tâches fastidieuses d’évaluation et de correction sont chronophages. Selon Wayne Holmes, co-auteur du rapport Pearson et conférencier à l’Institute of Educational Technology de l’Open University à Digital Trends :
« l’IA et tous les systèmes d'apprentissage numériques seront censés soutenir les enseignants plutôt que de les remplacer »
Wayne Holmes, co-auteur du rapport Pearson Tweet
Il s’attend à ce que les éducateurs aient des assistants intelligents pour rendre leur travail plus facile et plus efficace. Pour ce faire, et pour mieux définir le rôle de l’enseignant avec l’IA, Inge Molennaar distingue 6 niveaux d’automatisation pour un modèle d’apprentissage personnalisé comme moyen de positionner les pratiques actuelles de l’IA dans l’éducation et de discuter des orientations futures de l’IA dans l’éducation.
L’état de l’art du rapport de l’UNESCO prend en compte ce modèle : « 6 niveaux d’automatisation de l’apprentissage personnalisé » qui articulent les différents rôles de l’IA, des enseignants et des apprenants. Voici comment les solutions hybrides homme-IA combinent les forces de l’intelligence humaine et artificielle pour mettre en œuvre des solutions personnalisées d’apprentissage.
Intérêt des tableaux de bord pour l’IA
L’usage de l’IA avec l’adaptative learning suppose la mise en place de tableaux de bord qui permettent aux enseignants de mieux surveiller et guider le processus d’apprentissage. En outre, ce sont de véritables assistants pédagogiques qui aident les enseignants à mettre en place une pédagogie différenciée. Enfin, ils apportent un gain de temps et d’efficacité.
Les usages des tableaux de bord
L’étude d’Inge Molenaar examine comment les enseignants utilisent les tableaux de bord dans les classes du primaire. Pendant que les apprenants s’entraînent sur une tablette, des données en temps réel indiquant leurs progrès et leurs performances sont affichées sur les tableaux de bord des enseignants. Cette étude examine comment les enseignants utilisent les tableaux de bord, en appliquant le modèle de processus de « learning analytics de Verberts ». Des consultations sur le tableau de bord des enseignants et les actions pédagogiques qui en résultent ont été observées dans 38 cours de mathématiques. Lors d’entretiens de rappel stimulé, les 38 enseignants ont été invités à expliquer comment ils réfléchissaient et donnaient un sens aux informations du tableau de bord. Les résultats ont montré que les enseignants consultaient le tableau de bord en moyenne 8,3 fois par leçon. Ils ont activé les connaissances existantes sur les élèves et la classe pour interpréter les informations du tableau de bord. Les retours d’informations sur les tâches et les processus étaient les actions pédagogiques les plus souvent utilisées suite à la consultation du tableau de bord. De plus, les enseignants qui consultaient le tableau de bord activaient plus souvent des connaissances pédagogiques de plus en plus diversifiées pour interpréter les données et, par conséquent, donnaient des retours de plus en plus diversifiés. Ces résultats ont indiqué que les tableaux de bord des enseignants influaient effectivement sur les actions pédagogiques des enseignants dans leurs activités quotidiennes en classe. Ainsi, l’étude a fourni la première preuve que les tableaux de bord ont progressivement un impact sur la pratique enseignante et initient des changements de comportement plus profonds à mesure que les enseignants deviennent plus compétents dans leur utilisation.
Les tableaux de bord utiles à la décision
Comme nous le précise le dernier rapport de l’OCDE , les tableaux de bord permettent d’optimiser les apprentissages et les prises de décisions. Les systèmes éducatifs sont invités à accroître le soutien au développement professionnel des enseignants dans la prise de décision basée sur des données, telles que des tableaux de bord pour évaluer les performances et les progrès des élèves. L’UNESCO, à travers les travaux de Inge Molenaar, nous donne les lignes conductrices pour optimiser l’apprentissage avec les « learning analytics ».
Optimiser les apprentissages – La place des tableaux – Inge Molenaar 2021
Les tableaux de bord ont néanmoins des limites si nous prenons en compte la technique chinoise des bandeaux qui utilisent des capteurs d’électroencéphalographie (EEG) pour mesurer l’attention des élèves. En effet, les enseignants peuvent surveiller le niveau d’attention des élèves via un tableau de bord et savoir quel élève perd sa concentration. Ils peuvent également vérifier les indicateurs pour voir si quelqu’un se relâche. Une dérive est possible avec une surveillance à outrance.
Le co-enseignement « AI double teacher class »
Inge Molenaar chercheuse de l’Université Radboud au Pays-Bas s’est intéressée aux développements chinois du co-enseignement avec l’IA. Dans son rapport, elle décrit le dispositif. « Les deux enseignants, une animation sur le tableau intelligent et une personne réelle dans la classe, pouvaient entendre avec un programme de reconnaissance vocale si les enfants prononçaient correctement les mots. Sur cette base, ils ont fait des compliments ou des conseils supplémentaires. De nombreux étudiants chinois travaillent également à domicile avec un système d’IA en combinaison avec l’aide d’un véritable tuteur privé à distance. « S’ils rencontrent quelque chose que le système ne peut pas résoudre, ils sont aidés via un chat vidéo. »
Une expérimentation « AI Double Teacher Classroom » a débuté dans 100 écoles chinoises.
La société chinoise d’enseignement du codage en ligne, Codemao, a officiellement lancé son dernier service d’enseignement, le projet « AI double teacher class » pour les écoles primaires et secondaires. Il est entendu que la « classe à double professeur d’IA » est un service professionnel d’enseignement de la programmation d’IA en classe utilisant le mode d’enseignement du « moteur d’IA en ligne + 1 professeur hors ligne ». Le projet « AI Double Teacher Class » de Codemao prendra les devants en opérant dans 100 écoles sur des bases de démonstration dans tout le pays, et Codemao fournira des services d’expérience de classe en ligne.
Les apports des assistants vocaux
Captain Kelly, agent de conversation scolaire est une IA au service de l’apprentissage des langues vivantes. « Captain Kelly » est un assistant vocal qui vise à développer et permettre un meilleur apprentissage d’une langue étrangère par les élèves français. Cette IA permet l’interaction orale. Elle assiste le travail du professeur en développant plusieurs points :
- l’entraînement à la pratique de l’anglais ;
- avec l’amélioration de l’accent et de la prononciation ;
- et la compréhension des règles syntaxiques et lexicales.
L’IA peut remplacer un tuteur physique en simulant des discussions, et peut créer plus de 80000 phrases en temps réel (IA SpeakNow comme nous le montre «SpeakNow» qui a été lancé par MoneyBrain en Chine).
Quelle efficacité des projets d'IA dans l'éducation?
Que ce soit individuellement ou en équipe, dans leurs cours ou dans le cadre de projets de recherche, des professeurs, instructeurs et chercheurs testent systématiquement l’intelligence artificielle (IA) dans l’enseignement et l’apprentissage, enregistrant ce qui a fonctionné et ce qui n’a pas fonctionné, et partageant leurs découvertes avec leurs pairs du monde entier. Vingt exemples de projets de recherche sont accessibles en ligne mettant en exergue l’évaluation des projets IA et les réussites.
Open University of China
Open University of China a reçu un Prix UNESCO pour son utilisation de l’IA pour autonomiser les apprenants ruraux. « La plate-forme d’apprentissage intelligente permet aux enseignants de créer pour les étudiants des plans d’apprentissage personnalisés, en fonction du profil de chaque apprenant, et d’analyser leurs progrès grâce au Big Data. À l’aide de l’IA, elle oriente les étudiants vers différents parcours d’apprentissage. Elle peut distinguer les intentions des apprenants par une analyse vocale et sémantique. Et elle est capable de leur envoyer des textos pour répondre à leurs questions et les aider dans leurs études. De plus, elle allège la charge de travail des enseignants en réalisant un plus grand nombre de tâches routinières. En effet, les évaluations et la notation automatisée des essais fournissent aux étudiants une évaluation instantanée. Et elles leur indiquent des ressources d’apprentissage pertinentes. »
ViLLE du Centre de learning analytics de Finlande
Le Centre de learning analytics de Finlande a développé ViLLE, une plate-forme d’apprentissage numérique qui comprend du contenu pour l’étude des mathématiques, de la programmation, du finnois et de l’anglais. ViLLE est largement utilisé en Finlande. En effet, une école sur trois l’ayant adopté d’une manière ou d’une autre dans son enseignement. Ce projet primé par l’OCDE a « l’objectif de progresser l’application de technologies d’apprentissage et d’analyses pédagogiques et diversifiées dans toute la Finlande ainsi qu’à l’étranger. »
L’Université Radboud au Pays-Bas
l’IA peut à la fois être un coach ou un compagnon qui accompagne les élèves ou les étudiants dans l’apprentissage. De plus, l’autre particularité de l’IA est qu’elle est impersonnelle, tout en assurant une position de tuteur. Dès lors, l’apprenant ne dispose donc plus d’un assistant basique, mais d’un véritable partenaire. Il lui apporte tout le soutien nécessaire en prenant en compte les trois rôles de l’IA dans l’éducation défini par Inge Molenaar : détecter, diagnostiquer et agir. En outre, le chapitre 3 du dernier rapport OCDE Inge Molenaar (Université Radboud, Pays-Bas) traite de la personnalisation de l’apprentissage à la pointe de la technologie. Pour elle, l’ « adaptative learning » est une technologie dans l’éducation qui a atteint un domaine mature. Inge Molenaar nous explique que les technologies d’apprentissage existantes mettent fortement l’accent sur le diagnostic des connaissances des élèves et l’ajustement des commentaires ou des problèmes au niveau de la tâche. Quelle tâche ensuite ? Et quelle étape dans une tâche donnée ? Ou au niveau du curriculum, quel sujet ou unité de curriculum à venir ensuite ?
Les frontières dans ce domaine constituent des ordinateurs prenant en compte un éventail plus large de caractéristiques de l’apprenant telles que l’autorégulation, la motivation et l’émotion. Enfin, les recherches menées par les équipes nous montrent les effets positifs de l’apprentissage adaptatif pour fournir des parcours d’apprentissage personnalisés aux étudiants.
L'IA dans l'éducation : moyen d'apprendre et d'enseigner
En conclusion, dans notre article, nous avons décrit comment l’intelligence artificielle peut avoir un impact sur la relation enseigner/apprendre. Certes, les enseignants soient toujours considérés comme des figures irremplaçables dans la classe. Mais l’IA revisite le rôle de l’enseignant et modifie à la fois le visage et la fonction de l’éducation. L’un des défis auquel fait face notre système d’éducation aujourd’hui est de trouver un juste équilibre entre le maintien de certains aspects traditionnels de la pédagogie qui ont fait la richesse de l’enseignement depuis des siècles et la mise à profit des nouvelles possibilités qu’offre l’IA en éducation. Après tout, l’éducation et la technologie vont de pair ! Il reste à définir une hybridation de l’ IA et de l’intelligence de l’enseignant pour optimiser au mieux la réussite de tous les élèves. Nous avons vu aussi que l’IA pose le problème de la conception des programmes, sur l’individualisation de l’apprentissage et sur l’évaluation, offrant des aperçus prometteurs sur l’avenir. Or, d’énormes défis éthiques, techniques et pédagogiques à venir sont bien réels comme nous le précise Holmes : « nous devons mesurer le risque réel que les progrès rapides des services technologiques d’intelligence artificielle dépassent la capacité des systèmes éducatifs à les comprendre, les gérer et les intégrer de manière appropriée »
Michèle Drechsler est docteur en sciences de l’information et de la communication et Inspectrice de l’Education Nationale IEN retraitée. Passionnée par l’intégration du numérique dans l’éducation et la formation, elle a pu développer des expertises dans de nombreux domaine (Innovation, recherche, pilotage, gestion des connaissances…). Repenser la façon dont on apprend, dont on enseigne avec les potentialités du numérique a été un fil conducteur de sa carrière.
Un développement pertinent, exhaustif qui tient compte de l impact de l »IA au profit de différents partenaires concernés par l intelligence artificielle dans les domaines de l enseignement et la formation. .