L’Intelligence Artificielle (IA) révolutionne déjà le e-commerce… Et les e-commerçants sont conscients de la nécessité de prendre le train de l’IA ou, au moins, de s’y préparer dès maintenant. Ils se demandent comment implémenter les solutions IA, lesquelles choisir, combien cela va coûter et quel retour sur investissement (R.O.I.) espérer.
Table des matières
« Si les développements sont encore relativement limités, les dirigeants du e-commerce mesurent pourtant bien tout le potentiel de croissance permis par l’IA, et l’inscrivent tout en haut de leur agenda stratégique. »
Emmanuel Hembert, Associé KPMG, Leader de la Practice Consumer & Retail Advisory. Tweet
Afin d’aider les e-commerçants à mieux cerner les enjeux et opportunités de l’IA, je vous propose, dans cette première partie de mon enquête. J’y dresse un rapide état des lieux du e-commerce avec au passage quelques rappels de définitions. Puis, dans un second temps, je me penche sur la manière dont l’IA peut améliorer le parcours client. Ceci à travers différents cas d’usage et un premier panorama des solutions marketing disponibles.
Enfin, cet article s’inscrit dans le cadre d’une thèse professionnelle traitant de l’optimisation du parcours client e-commerce, dans le cadre du MBA en Management de l’Intelligence Artificielle à l’Institut Léonard de Vinci et à paraître en juillet 2021.
Etat des lieux du e-commerce en 2021 et définitions
Vous avez dit IA ? Machine learning ? Big data ?
Pour commencer, et pour éviter toute confusion ou fantasmes dignes de films de science fiction, quelques rapides définitions s’imposent. Mais si vous êtes déjà familier de ces notions, je vous invite à passer tout de suite passer à la partie suivante dédiée aux enjeux du e-commerce en 2021.
Intelligence artificielle (IA) :
ll s’agit, selon la définition plutôt équilibrée de Wikipédia, de « l’ensemble des théories et des techniques mises en œuvre en vue de réaliser des machines capables de simuler l’intelligence humaine ».
L’IA est un concept, voire une utopie, plutôt qu’une science constituée, et ses définitions sont variées. “La tristesse de l’Intelligence Artificielle c’est qu’elle est sans intelligence” selon Jean Beaudrillard, philosophe.
On parle souvent d’intelligence artificielle pour désigner le machine learning ou l’apprentissage automatique : lorsque la machine est capable d’apprendre « par elle-même » à la différence de systèmes experts notamment ou, plus généralement, des systèmes informatiques classiques.
Aujourd’hui, l’IA est une « IA faible » (à l’opposé d’une « IA forte »), et qui ne sait traiter que des problèmes spécifiques tels que : reconnaissance d’image, prédiction d’événements, classement, « compréhension » ou génération de texte en langage naturel, conduite autonome, etc.
Une IA forte, c’est-à dire pouvant s’adapter à des problèmes nouveaux et variés, comme le fait le cerveau humain, est au moins à l’heure actuelle hors de portée.
Machine learning (ML) :
Selon le contexte et la culture d’entreprise, il est soit synonyme du concept d’intelligence artificielle, qu’il englobe, ou il désigne une sous-catégorie de l’intelligence artificielle. C’est un système informatique appelé réseau de neurones, dans sa forme la moins complexe et la plus explicable (en opposition au deep learning). Certains l’assimilent aussi à l’apprentissage statistique, en opposition à l’apprentissage profond.
Le machine learning est alors utilisé pour le traitement de données structurées et notamment : la classification, le scoring et la segmentation. Il est ainsi prépondérant parmi les solutions proposées pour le marketing.
Le ML est principalement utilisé pour le traitement de données structurées et notamment : la classification et la segmentation. Il est ainsi prépondérant parmi les solutions proposées pour le marketing.
"Il y a autant de différences entre machine learning et deep learning qu'entre un avion à hélices et un avion à réaction."
Alfred Essa, McGraw-Hill Education Tweet
Deep learning (apprentissage profond) :
Il désigne l’apprentissage automatique dans sa forme la plus « profonde », dans la mesure où il implique des réseaux de neurones comportant plus de 3 couches. Par exemple, plusieurs milliers pour un algorithme comme Rank Brain, de Google. Il n’a pas besoin de données structurées pour créer des modèles et des corrélations. La mise au point d’un réseau de neurones de deep learning nécessite de très importantes capacités de calculs et des données massives.
Le deep learning est utilisé pour : la reconnaissance d’image, la reconnaissance faciale, le traitement du langage naturel, la génération de textes en langage naturel, la génération d’images, le computer vision, les deep fakes, les selfies, etc.
« Pour faire du deep learning, il faut disposer d'une grande quantité d'informations. Quelques centaines de milliers d'échantillons, ce n'était pas assez. » (évoquant un cas d'usage chez Linkedin)
Wenrong Zeng, experte en analytique et en statistiques chez LinkedIn (Microsoft) Tweet
Big data :
Ce terme désigne soit les quantités massives de données issues d’internet, soit la science et les techniques qui traitent ces données massives.
A noter : C’est l’explosion des données disponibles depuis l’avènement d’internet, corrélée au développement des capacités de calcul, qui a rendu possible l’émergence de l’intelligence artificielle telle qu’on la connaît aujourd’hui. Le deep learning a besoin de données massives pour son nécessaire entraînement préalable.
Chiffres clés et enjeux du e-commerce en 2021
Attardons-nous désormais sur le secteur du e-commerce. C’est un marché qui poursuit son essor. Il est caractérisé par l’ultra-compétition, un foisonnement exponentiel de solutions marketing. Et, in fine, un parcours client en perpétuelle révolution, avec notamment une omni-canalité accrue.
Explosion du e-commerce en 2020
Le secteur du e-commerce poursuit son essor, « favorisé » par les confinements et le contexte général de la pandémie qui a accéléré la digitalisation des commerces physiques et profité aux commerces en ligne existants.
Le chiffre d’affaires (CA) poursuit sa progression pour atteindre 112 milliards d’euros, soit 8,5% de hausse en un an, grâce à la digitalisation accélérée du retail dans le contexte de la pandémie de Coronavirus. Derrière ce chiffre se cache une hausse des ventes de produits de +32% et une baisse des ventes de service de -10%. Un total record de 1,8 milliard de transactions ont été enregistrées, soit une hausse annuelle de 5,8%.
En baisse ces dernières années, le panier moyen est remonté à 61 euros en 2020 (contre 59 euros en 2019).
Enfin, de nombreux nouveaux entrants ont rejoint la partie soit 17 400 sites web e-commerce supplémentaires de plus qu’en 2019. (Chiffres Fevad, Médiamétrie, bilan e-commerce 2020)
Pour Marc Lolivier, Délégué Général de la Fevad :
« L’année 2020, marquée par la crise sanitaire, a profondément bouleversé les habitudes d’achat de millions de Français. (…). Internet leur a permis de continuer à s’alimenter, s’équiper, se former, se divertir tout en respectant les mesures de protection sanitaire en vigueur. L’année 2020 a été un accélérateur de la digitalisation du commerce (…)"
La crise sanitaire a également développé certaines pratiques telles que la vente en ligne par les magasins (+53% par rapport à 2019) forcés de se digitaliser. On l’associe aussi à la pratique du click & collect en forte hausse de +41% (vs 2019). Pendant les confinements, on a même pu observer des pics à +100% pour les ventes en ligne des magasins avec l’accélération des livraisons à domicile, du click & collect et du drive.
Les marketplaces ont fortement bénéficié elles aussi de l’effet levier du covid avec une progression de +27% en un an. La vente sur les marketplaces a compensé une partie des ventes physiques pour de nombreux commerçants locaux.
Un dynamisme parti pour durer
Les nouvelles habitudes d’achat en ligne prises pendant la crise du coronavirus devraient perdurer. Les Français se sont habitués au confort de la commande en ligne et ont découvert une expérience client satisfaisante. Ces nouveaux comportements pourraient donc s’installer dans le temps.
En effet, près de la moitié des individus interrogés (44,8%) ont effectué au moins un achat au cours des 7 derniers jours. Parmi eux, 90% ont passé 1 à 3 commandes par semaine. « 80% des cyberacheteurs ayant davantage consommé en ligne en 2020 ont l’intention de continuer à le faire à l’avenir » conclut Jamila Yahia-Messaoud, Directrice du Département Consumer Insights de Médiamétrie.
Une compétition internationale et omnicanale
Le géant américain Amazon arrive en tête du classement des e-commerce en France en terme de nombre de visiteurs, suivi de Cdiscount, Fnac, Vinted et Carrefour, Wish, E.Leclerc, Darty et Ebay. A noter : l’irruption du chinois Aliexpress dans le classement, pourtant implanté en France depuis peu.
Dans ce classement , les e-commerçants français sont toujours présents mais en retrait comparé à 2019. La France est ainsi représentée à 40% dans le top 15 du classement avec dans l’ordre : Cdiscount, Fnac, Carrefour, E.Leclerc, Veepee, La Redoute.
L’usage mobile caracole toujours en tête, suivi de l’ordinateur puis de la tablette dans une moindre mesure. Deux applications 100% mobiles sont dans le top 6 : Vinted et Wish. Sur les 15 enseignes du classement, le nombre de pure-players (commerces exerçant une activité exclusivement sur internet, en opposition aux « bricks and mortar ») dépasse légèrement le nombre de magasins physiques, une évolution en faveur des pure-players comparé à 2019.
Le Top 15 des sites et applications « e-commerce » les plus visités en France – répartition par écran – 4ème trimestre 2020
Médiamétrie et Médiamétrie//NetRatings – Audience Internet Global – Catégorie créée spécialement pour la Fevad – Moyenne T4 2020 – France – Base : 2 ans et plus . L’évolution de classement se faisant sur un an, les acteurs renseignés comme « Nouveau » sont ceux absents du classement sur le Trimestre 3 2020.
42 millions de cyber-acheteurs
La majorité des français ont sauté le pas de l’achat en ligne, aujourd’hui pleinement entré dans les mœurs. 42 millions de Français ont fait au moins un achat en ligne en 2020, soit plus de 1,5 million de cyber-acheteurs supplémentaires en 1 an. En moyenne, 72% des Français ont consulté, chaque mois, au moins un des sites et/ou applications du top 15.
L’achat en ligne sur mobile, un temps délaissé pendant l’année 2020, revient au niveau de 2019 et attire 4 cyberacheteurs sur 10, et essentiellement une population féminine, jeune et CSP+ (« Catégories Socio-Professionnelles supérieures »).
Médiamétrie et Médiamétrie//NetRatings – Audience Internet Global – Catégorie créée spécialement pour la Fevad – Moyenne T4 2020 – France – Base : 2 ans et plus . L’évolution de classement se faisant sur un an, les acteurs renseignés comme « Nouveau » sont ceux absents du classement sur le T3 2020.
Omnicanalité et mobile-first
Aujourd’hui le consommateur veut pouvoir acheter tout, partout et à tout moment. Les points de contacts sont désormais multiples, avec toujours un avantage pour le mobile en termes de pages vues. Penser « mobile-first » aujourd’hui reste une excellente idée si l’on veut toucher un maximum de clients potentiels. Mais il faut aussi compter avec la version web, où ont encore lieu l’essentiel des achats, et la tablette dans une bien moindre mesure. Et bientôt les enceintes et autres équipements connectés ?
L’avènement du commerce vocal
Le shopping vocal n’en est qu’à ses débuts mais de nombreux acteurs du e-commerce considèrent qu’il deviendra une tendance lourde dans les années à venir.
Le shopping vocal consiste à réaliser des achats en parlant à des enceintes connectées comme Google Home ou Amazon Echo/Alexa ou à son smartphone via les assistants vocaux Apple SIRI , Google Assistant ou Bixby chez Samsung.
Aujourd’hui, 57 % des Français se voient commander leurs courses par des commandes vocales (Étude Hello Open World/KPMG – 2018). 28 % des utilisateurs d’assistants vocaux s’en sont déjà servis pour effectuer un paiement ou envoyer de l’argent.
"De nos jours, le commerce vocal (ou Voice Commerce) génère déjà plus de 2 milliards d'euros de chiffre d'affaires dans le monde. En 2022, ce dernier pourrait atteindre les 40 milliards"
Cabinet OC&C Strategy Consultants, 13 janv. 2020 Tweet
La recherche vocale pourrait ainsi bouleverser les comportements d’achat et de recherche de produits par les consommateurs. Et donc, pour les entrepreneurs et marketeurs du e-commerce, la manière de faire du SEO (Search Engine Optimization). Une raison de plus pour s’intéresser aux intentions de recherche à l’heure où Google se dote d’une compréhension plus sémantique (compréhension du sens des mots et des phrases au-délà de la compréhension des mots-clés), depuis le déploiement de Rank Brain.
Un foisonnement de solutions marketing
Pour répondre à ces besoins digitaux grandissants, il existe un nombre exponentiel de solutions marketing (source Chiefmartec.com), soit 1314 recensées rien que pour le commerce… Toutes ne comportent pas de l’IA. En effet, automation ou automatisation ne signifie pas nécessairement qu’il y existe une composante de machine learning.
De 150 solutions marketing en 2011, nous sommes passés à :
Pour le commerce : on observe une augmentation de 9% du nombre de solutions digitales en l’espace d’un an.
Source : https://martech5000.com/
En bref, tout va très vite… Les solutions marketing se multiplient modifiant en continu les process de tous les acteurs. Et elles obligent un suivi régulier de son martech pour se tenir à jour ou saisir les nouvelles opportunités en terme de performance ou d’amélioration du parcours client. Un point aussi en faveur des « méthodes agiles » et d’une philosophie du « test and learn » en vogue actuellement.
IA Commerce : Quels enjeux de l'IA pour le e-commerce aujourd'hui ?
Un parcours client à révolutionner (en permanence)
CX, marketing automation et maintenant IA… Le parcours client digital est au centre des préoccupations et n’en finit pas d’être révolutionné. Voici un rapide tour d’horizon des tendances et buzzwords du moment permettant d’appréhender les évolutions les plus récentes du parcours client digital.
Une expérience client à enchanter
En 2021, l’expérience client est sur toutes les lèvres et le X (comme « eXperience ») fait son entrée dans de nouveaux concepts marketing. Les buzzwords du moment que j’ai listés ci-dessous désignent cette volonté de transformer l’expérience d’achat en moment de vie agréable et même spécial. L’achat connecté se doit aujourd’hui d’être social, vocal, omnicanal, divertissant et conversationnel.
UX / CX / BX ou encore SXO : L’expérience (X) est la clé. Il s’agit d’optimiser l’expérience utilisateur (UX) ou client (CX). Accenture évoque de son côté un BX comme business experience. Autre buzzword, le SXO est une approche SEO qui met l’accent sur l’expérience utilisateur et la qualité des contenus.
Shoppertainment : C’est, dans le sens d’une gamification du parcours client, l’expérience d’achat transformée en expérience ludique, interactive voire immersive, via des live-streamings (dans le cadre d’un « live-shopping »), des photos, des vidéos et des jeux interactifs, dans le but de générer des transactions. Concept issu de l’étude Forrester 2020 pour AliExpress.
"Avec l‘émergence de la tendance du shoppertainment dans le e-commerce européen, les entreprises auront un tour d’avance si le contenu présenté aux consommateurs est pertinent, digne de confiance et divertissant."
Xiaofeng Wang, Senior analyst chez Forrester Tweet
V commerce comme Voice commerce / commerce vocal : Il s’agit de commerce via simple commande vocale sur smartphone (SIRI, Google Assistant,…) ou sur enceinte connectée (Amazon Echo/Alexa, Google Home,…).
V commerce comme Virtual commerce / commerce virtuel : Désigne l’expérience d’achat en réalité augmentée. Promise à un bel avenir en cette période où on recherche des expériences contactless (sans contact), cette approche ne fait finalement que tenter de reproduire à distance les caractéristiques de l’achat dans un magasin physique.
Social commerce / social shopping : Il s’agit de l’utilisation des réseaux sociaux pour communiquer ou au sens plus strict, de vente sur les réseaux sociaux tels que Facebook, Instagram, Wechat, Pinterest, etc, sans passer par un site web e-commerce.
Commerce conversationnel : Le client a la possibilité de réaliser un achat, en parlant à un agent conversationnel sur son smartphone ou son enceinte connectée.
Phygital : Ce terme désigne la réalité des enseignes qui proposent une expérience d’achat physique et digitale (en boutique et en ligne).
Ces différentes tendances vont dans le sens d’une facilitation et d’une ludification du parcours client digital. L’acte d’achat s’inscrit dans la vie quotidienne et qui se doit donc d’être particulièrement plaisant et fluide, a minima, et un moment exceptionnel dans le meilleur des cas (shoppertainment, commerce virtuel, gamification). L’IA et ses possibilités d’hyperpersonnalisation, d’immédiateté et d’humanisation (commerce vocal, conversationnel) ont un intérêt évident dans l’amélioration de l’expérience client dans cette optique.
Ultra-optimiser un parcours client déjà automatisé
Les meilleures pratiques marketing en e-commerce aujourd’hui intègrent déjà de nombreuses fonctionnalités d’automatisation, et ce même sans IA. Celles-ci, correctement pensées et orchestrées, apportent une plus value au client, de sa recherche de produit à l’achat final, puis après la vente dans ses relations avec le service client, en apportant des réponses au moment où celui-ci est censé en avoir besoin. Voici un point rapide sur les approches du moment du côté de l’automatisation avant de s’intéresser à ce que peut signifier l’avènement de l’IA marketing.
Le marketing automation et CRM :
Il s’agit de communiquer auprès du prospect (marketing automation) ou du client (CRM) selon des scénarios pré-établis et avec des messages types écrits à l’avance. Finement segmentés, ils permettent déjà une personnalisation et des gains de performances intéressants. De nombreuses solutions de marketing automation et de CRM clés en main sont disponibles et s’adressent à tous types d’entreprises dont les TPME.
Marketing prédictif :
Il s’agit d’anticiper les intentions du client de manière à créer de nouvelles opportunités d’achat ou, par exemple, rattraper un client sur le départ au moment où celui-ci prévoit de résilier. L’IA est un allié de choix en terme de marketing prédictif.
Source : https://www.matthieu-tranvan.fr
« 50 % des consommateurs affirment être prêts à quitter une marque si une enseigne n’anticipe pas leurs besoins » .
Salesforce dans son rapport "Personnalisation des expériences d’achat Tweet
IA marketing :
Ce concept présuppose que l’avènement de l’IA sera de nature à faire entrer le marketing dans une nouvelle ère. Fred Cavazza parle plus prudemment de l’avènement du marketing augmenté.
L’utopie d’un marketing à la fois ultra-personnalisé et parfaitement automatisé sur le point de se réaliser ? Les capacités d’analyse et de prédiction du machine learning et les capacités de compréhension et de génération de contenus créatifs personnalisés du deep learning devraient permettre à l’IA marketing de combiner le meilleur des mondes : analyse, automatisation, prédiction et même créativité, humanité… Ainsi la promesse de l’IA marketing serait de fournir une expérience client aussi qualitative que si le plus compétent et créatif des assistants personnels humain devançait 24/7 les besoins du client et ceci dans des volumes industriels et de manière totalement automatisée.
Data first ! Extraire et exploiter l’or caché dans les données clients
« N’ayez pas peur de l’IA mais peur de votre retard en data. » Fred Cavazza
Les e-commerçants ont de l’or caché dans leurs nombreuses données… Le tout est de savoir l’extraire et l’exploiter. Les données-clients sont par définition une opportunité de mieux connaître son prospect ou son client et donc de communiquer efficacement avec lui, et in fine de mieux convertir, à moindre coût. Les e-commerçants ont un avantage majeur sur de nombreux autres secteurs d’activités : ils disposent d’énormément de données de qualité, ce qui est un des principaux pré-requis pour un projet de machine learning.
On parle beaucoup d’entreprises « data-driven » en ce moment. A l’extrême, le titre choc de ce livre annonce la couleur : Mon directeur marketing sera un algorithme, de Stéphane Amarsy
Sans aller aussi loin, les e-commerçants ont désormais compris que la data était devenu un levier essentiel de croissance. Et dans le cadre d’un marketing automatisé et désormais dans la perspective d’être exploitée grâce aux solutions marketing intégrant de l’IA.
Les types de données intéressantes dans un contexte e-commerce peuvent être : démographiques (mais attention au respect du RGPD qui limite les usages de données personnelles), commerciales (paiement, commandes, transactions), comportementales (besoins, préférences, opinions, désirs) ou encore des données d’interaction : historique des contacts et actions de l’utilisateur.
Ce sont celles-ci qui vont permettre, par exemple, d’envoyer une promotion sur-mesure au moment et dans le contexte précis où le client est le plus enclin à acheter.
Source : www.matthieu-tranvan.fr
Se préparer à l’IA Commerce
Jeff Bezos : « Ce qui est dangereux, c’est de ne pas évoluer. »
Fred Cavazza : « Adapt or die. »
L’avenir appartient à ceux qui sauront évoluer à temps. C’est à la fois une menace et une opportunité… Cette transformation passe par un réel investissement de la part des e-commerçants qui doivent commencer par une acculturation des équipes aux opportunités et enjeux de la data et de l’IA. Cela peut aussi passer a minima par le soin porté à la collecte, au traitement et au partage des données-client au sein de l’entreprise, au bénéfice de l’expérience client et en prévision des projets IA à venir.
Quand l'IA Commerce transforme le parcours client
Ce que peut l'IA pour le e-commerce - quelques cas d'usages
L’IA couplée avec les meilleures approches du moment et une stratégie humaine pertinente a d’ores et déjà fait la preuve de son efficacité. En effet, elle peut apporter des gains de performance conséquents et une réelle valeur ajoutée pour le e-commerce, côté client et commerçant. C’est ce que nous verrons dans cette partie, à travers différents exemples.
Les e-commerçants attendent des réponses concrètes sur la manière d’implémenter l’IA dans les 5 catégories d’application suivantes, (KPMG-FEVAD 2018) :
- La personnalisation et l’amélioration de l’expérience client
- La recherche visuelle
- La gestion de la base de données des marketplaces
- Les chatbots (pré- & post-vente) et assistants personnels
- La gestion robotisée de la logistique et des stocks pour les commerçants (cette notion ne sera pas abordée dans cet article dédié au parcours client)
Selon cette même étude, les e-commerçants sont en recherche sur le court terme d’innovations rapides dans le domaine de l‘expérience client. Et tout particulièrement pour « la gestion automatisée et en temps réel du prix, les recommandations produits et le marketing personnalisé. »
Les solutions IA pour le marketing peuvent en effet répondre à ces attentes. Elles interviennent à chaque étape du parcours client. Chacune ayant son ou ses champs d’interventions spécifiques, comme le montre le graphique suivant qui synthétise les principales applications de l’IA marketing à chaque moment de vérité du parcours d’achat.
Passons enfin aux exemples concrets où l’IA apporte une valeur ajoutée qui ne serait pas envisageable par une « simple » automatisation.
Cas d'usages de l'IA pour l'acquisition et la publicité
Ces cas d’usages montrent que l’IA peut d’ores et déjà être un allié de choix dans la phase d’acquisition de trafic ou de clients.
Ciblage prédictif des visiteurs et push sur site
Cdiscount : Un cas d’usage qui mêle segmentation fine-tunée, analyse comportementale on-site, scoring en temps réel et push de bon de réduction.
Concrètement, lorsque la solution de machine learning identifie un visiteur comme “indécis”, s’affiche alors une pop-up contenant un bon de réduction. Ici le terme « indécis » désigne les visiteurs considérés comme ayant 50 à 90 % de chances de convertir.
Le ciblage prédictif permet à la fois de générer plus de CA (au minimum multiplié par 1,5 sur chaque campagne) et de réduire les coûts dépensés en bons de réduction (au minimum divisés par 2).
La rentabilité des campagnes (ROI = CA additionnel / coût des bons de réduction) est ainsi en moyenne 2 à 3 fois supérieure à celle des campagnes massives lancées sans ciblage.
« En passant au marketing prédictif, on multiplie par 2 la rentabilité de nos campagnes promotionnelles »
Ferdinand Tomarchio, Directeur commercial et marketing Cdiscount Tweet
Génération de contenus publicitaires personnalisés
Criteo – Dynamic creative optimization : Le leader français de la publicité en ligne et du retargeting Criteo propose d’optimiser la performance en acquisition avec l’aide du machine learning. En effet, l’entreprise propose des contenus dynamiques, générés automatiquement en fonction du comportement d’achat et des produits pour lesquels le prospect a montré un intérêt. L’IA propose la combinaison de couleurs, de design et de textes les plus susceptibles de convertir, selon l’analyse d’une base de données de 1.9 milliard d’insights par mois. Le visuel généré respecte la charte graphique de la marque.
Cas d'usages de l'IA pour la conversion
C’est sur le segment de la conversion que l’on trouve le plus de cas d’usages de l’IA dans le marketing et le e-commerce.
Moteur de recherche sémantique
Un bel exemple d’utilisation de l’IA pour l’invention d’une expérience client originale, agréable et, probablement, performante. Le fabriquant de parfums Givaudan a parié sur la start-up française Myrissi, qu’il vient de racheter, pour imaginer, notamment, le premier moteur de recherche sémantique dans l’univers du parfum.
En effet, Myrissi a développé une solution de « traduction sensorielle« , capable de traduire tous types d’odeurs, parfums ou arômes en couleurs et émotions et inversement » et ce, grâce à une combinaison d’intelligence artificielle et d’analyse comportementale. « Notre technologie propose deux usages aux professionnels : traduire les informations marketing en directions sensorielles, et vice-versa », explique Muriel Jacquot, co-fondatrice de Myrissi.
Le projet de Givaudan pour son site e-commerce est de permettre aux utilisateurs-trices de trouver leur parfum idéal en « évoquant la senteur de leurs produits de la manière la plus inspirante possible ». A plus long terme, le projet est de proposer, grâce à l’IA, de nouvelles approches narratives visuelles et verbales. A suivre…
Un moteur de recherche augmenté
Grâce à un moteur de recherche qui comprend et corrige les fautes de frappes et les erreurs d’orthographe, Décathlon a pu atteindre des résultats particulièrement remarquables : +175% d’augmentation du taux de conversion de recherche, une diminution de 48% du temps nécessaire à un acheteur pour effectuer un achat, une baisse de 63% du taux de sortie des clients après avoir utilisé la barre de recherche
Ici, c’est la solution Adeptmind qui a été implémentée. Il s’agit d’une plateforme d’apprentissage automatique utilisant le Traitement de Langage Naturel, un usage du deep learning appliqué à la compréhension du langage humain. La solution s’enrichit des données clients. Il s’agit du temps passé sur certaines pages ou les clics sur tel ou tel produit. Le moteur de recherche apprend de l’utilisateur pour lui proposer des réponses toujours plus pertinentes, tel que le ferait un vendeur humain en magasin.
Moteur de recherche par images
Plutôt que de décrire l’objet désiré ou de rechercher ses caractéristiques dans des arborescences complexes, pourquoi ne pas poster sa photo ? Une fonctionnalité parfaite notamment à l’heure où les influenceurs abreuvent les réseaux sociaux de photos d’objets sponsorisés.
Dans le moteur de recherche nouvelle génération dotée de reconnaissance d’image, il suffit de poster la photo de l’objet convoité pour être redirigé vers la page du produit ou des produits similaires. C’est ce que propose La Redoute via son application mobile.
Cas d'usages de l'IA en fidélisation
On trouve également de nombreux cas d’usages de l’IA dans le cadre de la fidélisation dans le parcours client. En voici trois.
Ciblage évolutif pour les campagnes emailing
Showroomprivé : Voici un exemple de machine learning au service de la performance des campagnes marketing par un ciblage évolutif, avec pour résultat des campagnes marketing « 2,5 fois plus efficaces« . Avant cela, la segmentation se faisait ponctuellement en faisant appel aux équipes IT pour extraire ponctuellement les données souhaitées. « Certains acheteurs potentiels pouvaient être sollicités plusieurs fois, quand d’autres ne l’étaient pas », selon Damien Garzilli, Chief Data & Innovation Officer chez Showroomprivé. De plus, les campagnes étaient déclenchées quel que soit le niveau d’intérêt du client cible d’où une perte de performance. Showroomprivé a voulu baisser les coûts de ses campagnes et améliorer l’expérience client par un ciblage plus pertinent. Le choix de solution s’est finalement porté sur la plateforme de machine learning Dataiku, après des essais de développement from scratch en interne qui ont montré une moindre performance quant aux taux d’ouverture. L’autre avantage de Dataiku a été l’appropriation de l’outil de ciblage par l’équipe marketing via une interface accessible aux non-datascientists. La performance des modèles sur lesquels s’appuie la solution sont maintenus dans le temps conjointement par l’équipe marketing et datascience dans une approche itérative. Showroomprivé travaillerait également sur de nouvelles briques, telles que le pricing dynamique et le scoring de produit.
Promotion au moment où l’utilisateur est connecté
L’agence française de Brand Technology, Notify, a mis au point une IA capable de repérer quand les appareils du client sont connectés afin de leur envoyer un message.
Partant du constat que 80% des messages envoyés par les commerçants ne sont ni lus, ni entendus, même quand le client a accepté de les recevoir (étude KPMG Fevad), la startup promet ainsi d’améliorer la visibilité d’une marque de 50% et d’obtenir un taux de conversion de 30%.
Chatbot – service client et réservation en ligne
"1 client sur 5 envisage d'acheter un produit ou un service via un chatbot."
Selon une étude Ubisend Tweet
Le chatbot dopé à l’IA est capable d’échanger vocalement ou à l’écrit en langage naturel et d’apporter une réponse ou une recommandation immédiate au visiteur, améliorant ainsi l’accueil et les conversions.
Le chatbot « Oui SNCF » permet non seulement de répondre aux questions des visiteurs à l’écrit ou à l’oral sur smartphone ou ordinateur mais également de rediriger vers la page de réservation du billet recherché. Il est doté d’un design agréable et répond aux questions des clients en langage naturel sur un ton plutôt décontracté. Ouibot a été développé sur la plateforme conversationnelle Tock développée en interne puis rendue disponible en opensource.
Résultat : Plus de 320 000 visiteurs uniques s’adressent à OUIbot directement sur la page d’accueil de OUI.sncf. Soit de nombreux échanges engagés en ligne avec la marque et de nombreux échanges évités avec un opérateur humain et 18000 ventes de billets réalisées chaque mois.
Panorama des solutions IA pour le e-commerce en 2021
"Très clairement, les IA sont l’avenir du marketing moderne, et elles vont aussi révolutionner les pratiques de communication et de publicité."
Fred Cavazza Tweet
En attendant l’avancement de mon travail de recensement des solutions d’IA commerce, voici sous forme d’infographie le panorama des solutions IA marketing proposé par Fred Cavazza et François Ziserman, où vous trouverez de nombreuses solutions transversales ou plus ciblées, à envisager pour le e-commerce classées dans nos trois catégories :
Source : https://fredcavazza.net/
A noter : de nombreuses solutions proposent des fonctionnalités transverses relevant des différentes catégories.
Quels pré-requis pour un projet IA quand on est e-commerçant ?
Certaines enseignes e-commerce disposent d’ores et déjà de plusieurs dizaines de salariés dédiés à la data-science ou à l’intelligence artificielle et développent leur propres solutions d’IA ou ont les moyens d’implémenter une solution en l’interconnectant au système existant, puis ensuite de la maintenir correctement.
Ce n’est pas le cas de la plupart des e-commerçants qui devront veiller à bien cibler leurs efforts de transformation.
La contribution d’un data scientist sera probablement le pré-requis minimal pour implémenter un projet IA. Les solutions IA sont nombreuses mais elles ne sont pas clés en main. En dehors peut-être d’un chatbot qui serait pré-entraîné sur une problématique très spécifique, une équipe dédiée sera nécessaire pour implémenter un projet IA, notamment si on veut l’interconnecter avec un système et des bases de données existantes.
Pour contribuer à votre réflexion, voici quelques questions à se poser avant de se lancer dans un projet d’IA :
- Mes process et mon parcours client sont-ils déjà optimisés ?
- Ma data est-elle « propre » et structurée ?
- Est-ce un investissement prioritaire ? (Un projet de chatbot peut commencer à 10 000 euros environ à mettre en regard du R.O.I. espéré)
- Ai-je les compétences en interne ? Sinon, il faudra, au mieux, former les équipes en place ou chercher des compétences à l’extérieur à commencer probablement par un datascientist.
- Ai-je le sponsoring de la direction ? C’est un facteur de succès important.
Si votre commerce est déjà structuré et que vous souhaitez commencer à tester l’IA, le conseil le plus répandu est de commencer « petit ». Vous pourriez par exemple développer un chatbot afin de mesurer rapidement une hausse du R.O.I. sans prendre trop de risques et de manière à susciter l’adhésion des équipes ou de la direction.
Conclusion
J’espère que ce rapide tour d’horizon aura aiguisé votre curiosité et vous aura permis de mieux cerner certains enjeux et opportunités liées à l’IA dans l’optimisation des performances du parcours client digital.
Mon enquête continue et s’étayera d’exemples plus détaillés. Retrouvez-moi sur ce même blog pour découvrir la suite de mes recherches visant à imaginer le meilleur parcours client à l’heure de l’IA-commerce et décrire les outils et méthodologies pour y parvenir.
En résumé :
- La révolution de l‘IA commerce est déjà en cours et les e-commerçants en sont conscients
- Data first ! L’or est dans la data
- L’IA est en capacité de sur-optimiser l’acquisition, les conversions ou la satisfaction client
- Vous avez un parcours client e-commerce optimisé et pas mal de data ? Il peut être judicieux de s’intéresser à l’IA
- Les solutions d’IA marketing se multiplient à toute vitesse
- Attention, ce ne sont pas des solutions sur étagère.
- Des compétences en datascience sont nécessaires
- Commencer petit : Pourquoi ne pas commencer par un smartbot ?
Marketer digitale et entrepreneuse, diplômée du MBA en Marketing et Commerce sur Internet, je compte 10 ans d’expériences variées en start-up et PME. Dans le cadre d’un MBA en Management de l’Intelligence Artificielle (ILV), je m’intéresse dans ma thèse à venir aux bénéfices de l’IA pour le e-commerce. Passionnée de nouvelles tendances, je suis aussi artiste numérique.